Un voile pudique (et volontaire?) sur les mouvements bancaires et financiers.
Les pseudo mystères des échanges monétaires et financiers
(Note rédigée les
23 et 24 juillet 2022 par Bruno Lemaire, ancien doyen associé d’HEC)
Nous supposerons ici que tous les
échanges se font par virement ou par chèques (voire par carte bancaire) mais ne
nous intéresserons qu’aux modifications des différents bilans des banques
concernées par la concrétisation financière des échanges commerciaux entre deux
personnages, appelés A, pour Arthur, acheteur, et V, Valentin, pour vendeur.
Arthur va acheter pour 1000 euros un
bien ou un service à Valentin
Trois cas. A et V
ont la même banque, ou deux banques différents dans le même pays, ou deux
banques différentes dans deux pays différents (de la même zone monétaire, à
savoir la zone euro, composée de 19 pays)
Cas 1.
La banque de A et de V est identique. Cas simple, le total du passif (et
donc du bilan) de cette banque commune ne change pas, seule sa composition va
changer, le compte de A, CptA va diminuer de 1000, le compte de V, CptV, va
augmenter de 1000
Actif |
Passif |
Différents actifs |
ACptA :-1000 Autres comptes et autres passifs |
Total Actif : X |
Total Passif : X |
Les échanges n’ont concernés qu’une
seule banque, la seule monnaie échangée est de la monnaie ‘bancaire’. La
monnaie centrale, la seule monnaie que ne peuvent créer les banques
commerciales, n’a pas été utilisée. On pourrait se passer, ici, de monnaie
centrale, et donc de banque centrale.
Cas 2. Les banques BA et BV sont
différentes, la Banque Centrale Nationale (BCN) du pays va devoir intervenir
pour ‘compenser’ les échanges entre deux banques commerciales différentes
Passif Banque A |
|
Actif Banque V |
Passif Banque V |
|
Différents actifs |
CptA :-1000 Autres comptes |
|
Différents actifs |
CptV : +1000 Autres comptes |
Total Actif : X -1000 |
Total Passif : X - 1000 |
|
Total : Y + 1000 |
Total : Y + 1000 |
Le bilan de la banque BA a diminué de 1000, le
bilan de la banque BV a augmenté de 1000
Ces modifications de bilan se voient
dans la composition du passif de la
banque centrale du pays concerné, dont le total reste inchangé, de la façon
suivante :
Banque centrale nationale (BCN) du pays
concerné |
|
Actif |
Passif |
Différents actifs (Prêts à l’économie) |
Cpt Banque BA : - 1000 Cpt Banque BV : + 1000 Autres éléments du passif |
Total Actif : Z (inchangé) |
Total Passif : Z (inchangé) |
Bien entendu, dans les deux cas ci-dessus, nous avons supposé que les comptes courants, des particuliers A et V, et des banques concernées étaient telles que les flux financiers de 1000 euros ne nécessitaient pas d’emprunt (ou d’autorisation de découvert)
Cas 3 : Achats transfrontaliers, les deux banques appartiennent à deux pays différents, par exemple la France et l’Allemagne, Arthur est un acheteur résidant en France, ainsi que sa banque, Valentin est un vendeur résidant en Allemagne, ainsi que sa banque.
Cette fois ci on va devoir faire
intervenir deux entités bancaires différentes, c’est-à-dire au lieu d’avoir
une seule banque centrale nationale pilotant deux banques commerciales du m^me
pays, on va avoir une super banque centrale, la banque centrale européenne, la
BCE, qui va piloter les deux banques nationales (BCN) de France et d’Allemagne,
presque comme la banque nationale d’un pays donné pilotait deux de ses banques
commerciales.
Le seul problème est que les euros
pilotés par la banque de France ne sont pas pilotables directement par la
banque d’Allemagne, et inversement. Il va falloir passer par des mouvements
bancaires qui devront être inscrits sur le bilan de la BCE, ainsi qu’au bilan
des banques de France et d’Allemagne
Il va falloir s’intéresser à deux
ensembles de bilan, celui des deux banques commerciales, ainsi qu’à celui des
deux banques centrales
Pour les banques commerciales de A et
de V, rien n’a vraiment changé, pour leurs bilans du moins.
Passif Banque A |
|
Actif Banque V |
Passif Banque V |
|
Différents actifs |
CptA :-1000 Autres comptes |
|
Différents actifs |
CptV : +1000 Autres comptes |
Total Actif : X -1000 |
Total Passif : X - 1000 |
|
Total : Y + 1000 |
Total : Y + 1000 |
Le bilan de la banque BA a diminué de 1000, le
bilan de la banque BV a augmenté de 1000
Ce qui va changer, c’est pour les deux
banques centrales nationales, dans notre hypothèse celle de la France et de l’Allemagne,
mais que l’on va noter BCNdeA et BCNdeV
Actif Banque BCNA |
Passif Banque BCNA |
|
Actif Banque BCNV |
Passif Banque BCNV |
Prêts à l’économie |
CptBanqueA :-1000 Autres comptes Dette TARGET : 1000 |
|
Prêts à l’économie Créances TARGET : 1000 |
CptBanqueV : +1000 Autres comptes |
Total Actif : X -1000 |
Total Passif : X - 1000 |
|
Total : Y + 1000 |
Total : Y + 1000 |
Le bilan de la banque BCN_A a été modifié, au passif, par l’écriture d’une dette TARGET de 1000 (et par la diminution du compte de la Banque commerciale de A, BanqueA. La base monétaire gérée par la Banque centrale BCN_A, a diminué de 1000. Le bilan reste (virtuellement) équilibré, grâce à cette nouvelle ‘dette’ au passif. L’actif est inchangé
Le bilan de la
banque BCN_V a été modifié, au passif, par l’augmentation du compte de la
Banque commerciale de V, BanqueV. Au passif, pour équilibrer le bilan on va
noter une créance (virtuelle) TARGET de 1000. Il y a eu augmentation de la base
monétaire gérée par BCN_V. Tout se passe comme si de la monnaie était passée
du pays de A au pays de V
Au bilan de la Banque Centrale
Européenne, ces différents ‘flux’ TARGET ont été inscrits, et ne devraient pas
modifier le total de son bilan. Il se trouve, cependant que les banques se prêtent
parfois de l’argent directement, et que ces flux financiers peuvent modifier
les ‘flux’ Target vus plus haut. C’est ainsi que la BCE a elle aussi d’énormes dettes
TARGET (alors qu’elle ne devrait en evoir aucune) essentiellement destinée à
combler un peu les dettes Target de l’Italie et de l’Espagne, de l’ordre de 500
milliards, alors que la France, elle, est à peu près à l’équilibre (les banques
françaises ayant meilleur crédit que leurs collègues italiennes ou espagnoles)
Nous parlerons des emprunts, et du "quoiqu’il en coûte", (des
dettes monstrueuses), dans un autre billet.
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