Plaidoyer pour l'instauration d'une monnaie complémentaire

Bruno Lemaire, lesamoureuxdelafrance2020

L'argent semble couler à flots de nos jours. On ne sait s'il faut remercier la BCE de sa générosité qui l'a conduite à envisager la distribution de 1500 milliards d'euros en quelques mois, en s'asseyant pour cela sur un traité monétaire qu'elle s'était jurée de défendre "coûte que coûte". Ou bien encore s'il faut remercier la peur créée par un virus étrange qui a mis à l'arrêt la France pendant l'équivalent d'un mois plein.

Quoiqu'il en soit, cet argent, s'il n'est pas utilisé pour réindustrialiser la France, pour y relocaliser ses industries qui naguère encore en faisaient sa grandeur, pour redonner du travail à ses concitoyens dont certains auraient presque perdu tout espoir de vivre dignement et honnêtement de leur travail le monde d'après sera, comme le dit Houellebecq, pire que le monde d'avant.

Bien sûr, certains esprits chagrins, peut être guidés par le simple bon sens, pourraient s'étonner que la BCE ait pu trouver si vite autant d'argent, alors que quelques mois avant, la plupart des gouvernements européens, dont le gouvernement français, répétaient urbi et orbi qu'il fallait faire un peu partout des économies.

Il n'empêche, par un processus réservé aux seules banques centrales, et dans une moindre mesure aux banques commerciales, cet argent a pu être créé quasiment instantanément. Il a suffi pour cela à la BCE (et la "Federal Reserv" et la Banque d'Angleterre ont procédé de façon similaire) d'inscrire, à son passif, donc sur le compte de ses nouveaux emprunteurs, ici les états de l'U.E., 1500 milliards, et, à son actif, 'créances' (ou dettes ou "obligations souveraines") de la France, ou de l'Italie, ou de l'Espagne, ou de l'Allemagne, … ce que la cour constitutionnelle allemande n'a pas eu l'air d'apprécier, d'ailleurs.

En fait, en dehors de violer ainsi les traités de Maastricht et de Lisbonne, si la BCE a pu faire cela c'est que, légalement, la banque centrale a le droit de "battre monnaie", et l'argent ainsi créé a cours légal et forcé, tout agent économique appartenant à l'Union Européenne Monétaire (la "zone euro") est obligé de l'accepter.

Si la BCE n'avait jamais procédé ainsi, au moins massivement, c'était qu'elle tenait encore à la légende  qu'elle ne battait monnaie que contre des gages fournis, non par les états eux-mêmes, mais par les marchés financiers, forcément plus sérieux que les états eux-mêmes. Mais la chute vertigineuse de ces mêmes marchés financiers a mis à mal cette légende, au moins provisoirement.

Nous en arrivons alors à la vraie question: que va devenir cet argent, à qui va t-il servir, et comment.

Comme nous l'avons indiqué précédemment, si cet argent sert à importer toujours plus des produits "made in Asia", la seule conséquence sera que cet accroissement de dettes (on parle de 350 milliards de dettes publiques supplémentaires pour la France) se traduira par un déficit supplémentaire de la balance commerciale, sans même améliorer de façon significative l'emploi.

La seule façon d'éviter cela, un monde d'après pire que le monde d'avant, et une mondialisation profitant à quelques uns, et à leurs parasites, et nuisant à la majorité des autres, chômeurs ou esclaves, est que la monnaie supplémentaire émise ainsi "à gogo" ne puisse servir à "acheter étranger".

Bien sûr les traités, même bafoués, ne peuvent empêcher cela, la commission européenne, même si elle n'est composée que de fonctionnaires non élus, y veillerait.

La solution que je propose, la seule solution envisageable en fait, serait que la Banque de France émette  directement, ou permette l'émission, d'une monnaie "nationale", locale à la France, qui ne pourrait permettre l'achat que de produits français. Monnaie nationale ou bons d'achat, peu importe, mais cette monnaie aurait cours légal, et forcé, en France, au moins pour payer des produits ou des services locaux, donc français. Affaire à suivre ...



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