Inflation, Stagflation, de grands mots pour ne pas traiter le problème et ses vraies causes?
Inflation, de quoi parle-t-on vraiment?
Un peu de sémantique tout d’abord. Ce
mot vient du mot latin « inflatio » («enflure», «
gonflement », « dilatation »), venant lui-même de inflatus, participe passé de
inflo : « souffler dans » ou « insuffler ».
Le mot inflation signifie donc à l’origine
« augmentation forte, voire excessive ». Il peut y avoir
inflation du nombre de ministres, inflation du nombre de moustiques, inflation
d’immigrés, l’inflation étant rarement synonyme d’un phénomène que l’on trouve agréable
ou bénéfique. Certains physiciens ont aussi parlé de l’inflation de l’univers,
et du nombre de ses galaxies, survenue après le « big bang ».
En économie, et dans le langage courant,
on parle d’inflation, souvent sans qualificatif, pour parler de hausse des
prix, sans nécessairement en comprendre, ni même en rechercher, les causes.
On parle cependant parfois d’inflation monétaire (trop d’argent par rapport à l’offre
de biens disponibles), d’inflation spéculative (par exemple dans le domaine de
l’immobilier ou des actifs financiers), ou aussi d’inflation par les coûts. En
cas de « hausse des prix », on en cherche le plus souvent les causes parmi des causes extérieures,
exogènes, ou on recherche encore, plus près de soi, des boucs émissaires :
les patrons augmentent trop leurs marges, ou les salariés veulent gagner trop d’argent,
ou, ou … En ce moment, c’est l’Ukraine et le méchant Poutine qui ont bon dos.
Et pourtant, dans la situation
actuelle, rien de plus simple à expliquer, il suffit de faire appel à son bon
sens.
Au cours de l’année 2020, la monnaie « centrale »,
la monnaie créée directement par la banque de France, sous l’égide de la BCE, a
augmenté de 510 milliards, à partir d’un niveau initial, fin décembre 2019, de
658 milliards, soit une augmentation, une « inflation » de 77%
(alors que les billets en circulation n’ont connu une augmentation que de 11%,
à savoir 27 milliards). Les banques commerciales n’ont pas non plus été
oubliées, puisque leurs réserves à la Banque de France ont augmenté de 349
milliards, soit une « inflation » de 65%. En fait, tout se
passe comme si ces banques avaient pour une bonne part ‘refilé’ leurs créances
douteuses à la banque de France, devenue par là même une « bad bank »
La hausse des prix que l’on constate actuellement,
et qui ne peut que s’accentuer à l’avenir, est donc essentiellement due à une
inflation monétaire, puisque alors que la masse monétaire, sous sa version ‘centrale’,
a augmenté de 77%, la production disponible, elle, a baissé de près de 9%,
d’après les chiffres mêmes de Bercy. Et ne parlons même pas ici du déficit
commercial, lui aussi « inflaté ».
Le bon sens, si loin des théories
fumeuses des experts, nous dit alors simplement que s’il y a hausse des prix, c’est
en premier lieu parce qu’il y a eu trop d’argent relativement
à la production disponible, ce qui est la caractéristique principale
de l’inflation monétaire.
En revanche, d’autres hausses de prix peuvent aussi se produire, si on s’intéresse cette fois ci à des secteurs bien particulier, par exemple les actifs financiers ou les actifs immobiliers, on pourrait la qualifier d’inflation de demande, voire de spéculation. Ainsi, si on a l’impression que la situation va s’améliorer plus dans un pays que dans un autre, les prix de l’immobilier peuvent s’envoler dans le pays jugé plus hospitalier.
Il peut aussi y avoir des achats
spéculatifs de biens immobiliers à l’intérieur d’un seul pays, pour essayer de
se prémunir contre la hausse des prix de l’ensemble des biens, sachant que l’argent
‘passif’ ne peut perdre que de la valeur (D’après mes propres calculs, au
cours de l’année 2020, l’argent « courant », celui qui correspond aux
comptes chèques et aux billets, s’est dévalorisé de 33%, dépréciation à
laquelle il faut ajouter celle de 2021, proche de 15%)
L’inflation du cours des actifs
financiers, quoique beaucoup plus aléatoire et volatile, pourrait aussi être
signalée.
Pour en revenir à la seule hausse des
prix , celle-ci se complique depuis deux ans d’une production très molle
(nous n’avons toujours pas retrouvé en France, en juin 2022, le PIB de la fin de
2019, même s’il y aurait beaucoup à dire sur la cohérence des mesures du PIB).
Les théoriciens adorant nommer ce qu’ils ne peuvent expliquer, ont trouvé un
terme savant pour décrire la simultanéité de la hausse des prix (prix « inflatés »)
et de la baisse de la production (stagnation ou récession), c’est la "stagflation".
Pour lutter contre
« l’inflation » (comprenons ici la « hausse des prix »)
certains proposent d’augmenter un prix, celui de l’argent, en augmentant le
taux d’intérêt auquel on peut emprunter.
Certes, le « quoiqu’il en coûte » a créé trop d’argent magique, mais ce n’est pas en rendant le futur argent plus cher que l’on peut espérer lutter contre … la hausse des prix. S’il y a déjà trop d’argent en circulation, n’en émettons pas davantage (ce qui est de la première responsabilité de la Banque de France et de la BCE), tout en bloquant peut être, si nécessaire, tout prêt bancaire qui ne serait pas garanti par l’existant, et non gagé sur de futures perspectives de croissance éventuelle.
Revenons aux prêts sur gages,
c’est-à-dire à des prêts accordés en contrepartie de valeurs réelles, existant
réellement, et non des emprunts basés sur des anticipations d’un avenir
toujours présenté comme radieux.
Par ailleurs, s’il y a trop d’argent par
rapport aux biens et services offerts, augmentons cette production,
de biens comme de services, en faisant travailler les inactifs, tout en
refusant d’acheter à crédit des produits venant principalement de l’étranger.
Ce n’est qu’en augmentant la production locale « domestique », tout
en restreignant toute augmentation de masse monétaire (que ce soit la monnaie
centrale M0, ou l’argent ‘bancaire’ M1) que la hausse des prix pourra être
jugulée, même si l’on peut s’attendre, sur les 10 prochaines années, à une
hausse de prix annuelle de 5 à 7%.
Relancer
la production et limiter la masse monétaire semble beaucoup plus efficace que d’augmenter les taux
d’intérêt : voilà ce que le simple bon sens suggère.
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