Une_Monnaie_Au_Service_Du_Bien_Commun

Pour une monnaie "100%" au service du bien commun.

Ce billet aurait aussi pu s'appeler: La crise - pourquoi tant d'aveuglement sur ses causes et ses effets, et donc ses solutions.

Cet aveuglement idéologique repose t-il sur une conception erronée du rôle exact que joue, ou devrait jouer, la monnaie ? Confondons-nous, par ignorance ou par malice, cet instrument - qui devrait être au service du bien commun, du bien public - avec le symbole tout puissant de la richesse, tels le roi Midas ? Peu importe à vrai dire. Le résultat est là.

On compare certes de plus en plus souvent la crise actuelle à la grande crise de 1929, mais sans vraiment aller au-delà d’une vague analogie reposant sur des comparaisons chiffrées portant sur la hausse du chômage et la baisse des valeurs boursières.

Tout se passe comme si les analyses qui ont été faites sur les causes profondes de la grande dépression n’avaient jamais existé.

C’est ainsi qu’à grands renforts de slogans – ou « d’éléments de langage » - slogans qui reposent le plus souvent sur la recherche de boucs émissaires dont l’identité dépend de l’idéologie du dernier ‘expert’ qui parle, on s’efforce de traiter l’un ou l’autre des symptômes d’une crise globale, systémique, et qui ne peut donc se traiter qu’en s’attaquant aux racines du mal, à savoir au système lui-même et à son fonctionnement actuel.

La crise actuelle, dont les préliminaires datent de la crise asiatique des années 1998 – dont le Japon n’est toujours pas sorti – n’est que la continuation de la crise de 2006-2008, dite des ‘sub-primes’. Celle-ci s’est révélée au grand public avec la chute de Lehman Brothers, qui a permis à son grand concurrent Goldman Sachs d’apparaître depuis lors comme faiseuse de rois, ou de premiers ministres.

M. Allais, décédé en 2010, est l’un des premiers à avoir pronostiqué, dès 1998, la crise qui allait déstabiliser l’Europe, et peut être le monde dix années plus tard, en s’appuyant pour cela sur une analyse de la crise de 1929.

Pour M. Allais, comme pour I. Fisher d’ailleurs, l’origine de la grande dépression commencée en septembre-octobre 1929 aux Etats Unis –et qui s’est terminée comme on le sait, par les horreurs de la deuxième guerre mondiale - représente la meilleure, ou pire, illustration que l’on puisse donner des effets nocifs d’un mécanisme incontrôlé et intrinsèquement pervers du crédit reposant sur:

1. la création et la destruction de moyens de paiement par le système du crédit,
2. le financement d’investissements à long terme avec des fonds empruntés à court terme,
3. le développement d’un endettement gigantesque,
4. une spéculation massive sur les actions et les monnaies,
5. un système financier et monétaire fondamentalement instable.

En rappelant que cette crise de 1929 a vu le PIB américain diminuer en 4 ans de 29%, faut-il s’étonner de la comparaison ainsi faite entre deux crises distantes de près d’un siècle, alors même que le financier G. Soros, bien vivant lui – et spéculateur à ses heures- a pu écrire, dès 2007: « le système financier international tout entier repose sur des bases erronées » ?

Faut-il donc s’étonner que la Grèce ait déjà vu une diminution de son PIB de plus de 10% en 2 ans, que l’Espagne compte près de 20% de chômeurs, et que la récession est annoncée pour l’ensemble de la zone euro par la plupart des prévisionnistes ?

Est-ce dire qu’il n’y a rien à faire, et qu’on ne peut que tenter d’atténuer les effets désastreux de cette crise par un accompagnement social, quand ce n’est pas uniquement par de simples vœux pieux à connotation fortement électoraliste?

Oui, si l’on refuse de tirer les leçons du passé en s’attaquant aux fondements même du système, tout en répétant à l’envi « il faut sauver l’euro, il faut sauver l’euro », en fermant les yeux devant les conséquences inéluctables, économiques, sociales et politiques, d’un tel aveuglement. Dans ce cadre là, il n’y a effectivement pas grand-chose à espérer pour la grande majorité des peuples et des nations qui composent la zone euro ou l’Union européenne actuelle.

Il y a pourtant une autre solution, celle que Fisher et Allais, encore eux, ont proposée, l’un depuis près d’un siècle, l’autre depuis des décennies. Cette solution, défendue par une poignée d’économistes plus ou moins hétérodoxes et de toute sensibilité politique (la fameuse union nationale dont on parle tant) revient à trois propositions qui changeraient de fond en comble le fonctionnement du système banco-financier, et qui se résument à une seule, la nationalisation de la monnaie, mais pas des banques :
1. Les actuelles banques de dépôts deviendraient de simples Sociétés de Services Monétaires (S.S.M) assurant seulement, à l’exclusion de toute opération de prêt, la garde et la gestion des moyens de paiement de leurs clients, et les comptes de ces derniers ne pouvant comporter aucun découvert ;
2. Des Sociétés d’Epargne et de Financement (S.E.F), ou « banques de prêts » emprunteraient et prêteraient ces fonds, la « vraie épargne », le montant global des prêts ne pouvant excéder le montant global des fonds empruntés.
3. Des Sociétés ou Banques de Marchés et d’Investissement (B.M.I ou S.M.I) chargées de mettre en place des solutions de financement direct et de vendre, structurer et gérer des instruments financiers.

Une monnaie « 100 pour cent au service du bien commun ».

Cette triple proposition – parfois connue sous le nom de « 100% monnaie centrale » (qu’il faudrait mieux traduire par une monnaie 100% au service du bien commun) aurait pour conséquence de redonner une souveraineté monétaire pleine et entière à la nation, ou au groupe de nations, qui déciderait de l’appliquer.

Des calculs ont été faits à ce sujet pour l’Europe et pour la France.

Dans ce dernier cas, il a été calculé que, sans la moindre modification de la masse monétaire actuellement en circulation (que ‘on se réfère aux agrégats M1, M2, voire M3), les mécanismes en jeu dans la transition entre le système financier actuel et celui du « 100% » pourraient conduire à une neutralisation progressive de la dette publique de l'Etat de l'ordre des 2/3, avec un montant substantiel dès la première année équivalent aux obligations d'état détenues par les banques: ce qu'Irving Fisher appelait déjà en 1935 le "Dividende Social" de la réforme.

Cette neutralisation correspondrait ‘simplement’ – si l’on peut dire - à la remontée progressive des obligations publiques françaises à l’actif de la banque centrale, les intérêts éventuels restant à courir apparaissant alors comme des rentrées supplémentaires pour le Trésor Public, et non comme une dépense supplémentaire.

Cela éviterait de ce fait de continuer les opérations de cavalerie actuelle, consistant à ce que la Banque Centrale rachète sur le marché secondaire, le marché d’occasion, des obligations publiques, tout en permettant aux banques secondaires, elles, d’acheter directement, au prix du neuf, de nouvelles obligations publiques permettant de rembourser de vieilles obligations venant à échéance.

Alors oui, nous pouvons sortir par le haut de la crise actuelle, mais cela ne peut se faire qu’en modifiant complètement la façon de gérer notre système monétaire, en interdisant dorénavant aux banques de second rang, qu’elles s’appellent SG, UBS, CA, BNP ou autres de « battre monnaie ». On comprend pourquoi certains de leurs experts voient cela d’un très mauvais œil.

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