Souveraineté monétaire et euro-franc
Reprenons le contôle de notre monnaie en reprenant le contrôle de la Banque de France.
Philippe Murer a fort judicieusement dit dans son
intervention à l’université des "Forces Vives", le 8 octobre 2022, que tant que
la Banque de France serait dans le giron de la BCE, la France ne pourrait
être souveraine économiquement. Il en a déduit, à tort d’après moi, qu’il
fallait sortir de l’Euro.
En fait, l’Euro étant une monnaie « commune »,
et non une monnaie « unique » (puisqu’il y a 17 banques
centrales nationales dans la zone euro, ce qui explique que les banques
commerciales françaises aient leurs comptes à la Banque de France, et pas à la
Banque Centrale Européenne) , il
suffirait que la Banque de France prenne son indépendance de la BCE, tout en
rentrant dans le giron de l’Etat français. La Banque de France deviendrait
alors dépendante de la France, et il n’y aurait nul besoin de sortir formellement
de l’euro, « monnaie commune » rappelons-le.
La conséquence en serait fort simple. De même qu’il y a un
euro Crédit Agricole et un euro Crédit Lyonnais (et qu’une demande d’argent à
un terminal bancaire du Crédit Agricole à l’aide d’une carte bancaire Crédit
Lyonnais déclenche une compensation auprès de la Banque de France, le compte
Crédit Lyonnais étant augmenté et le
compte Crédit Agricole étant diminué au passif de la Banque de France), de même
il y a un euro « français » et un euro « allemand. Tout achat
par un français d’un produit allemand s’accompagne, de même, d’une « compensation »
au niveau cette fois-ci de la BCE.
La seule ‘petite’ différence est que cette compensation s’effectue
au niveau du système des soldes « Target 2 », crédits ou à l’inverse « liabilities ».
La BCE s’efforce, tant bien que mal, de conserver la parité de un pour un entre
les différents euros de la zone euros, ce qu’elle fait en « jouant »
sur les différents soldes Target2, ce qui se concrétise par un énorme « déficit
Target 2 » pour l’Italie et pour l’Espagne, et un solde Target2 positif deux
fois plus important, voisin de 1216 milliards, pour la Banque Centrale allemande. Le « solde
Target2 » de la BCE n’est d’ailleurs pas nul, alors que si le système
était pleinement fonctionnel il devrait l’être. Au contraire, il est fortement
négatif, et égal, fin juin 2022, à 340 milliards, ce qui signifie que l’euro
est dans une situation très instable. Si la Banque de France prenait son
indépendance vis-à-vis du système bancaire européen, il est fort probable
que le système tout entier s’écroulerait.
Le seul bémol est que, contrairement à la période qui s’est
terminée en 2020, le solde Target de la France est négatif, et valait fin juin 104
milliards. Il faudrait sans doute combler ce déficit auprès de la BCE pour
pouvoir partir dans des conditions ‘régulières’. Il est vrai que relativement
aux « déficits Target » de l’Italie, de 627 milliards, et de l’Espagne,
de 516 milliards, la position de la Banque de France est relativement solide.
Bruno Lemaire, économiste, ancien doyen associé de HEC. Ce que tout politique doit savoir en économie
Bonjour,
RépondreSupprimerPuisque l'euro est déjà monnaie commune, alors il n'y a plus qu'à mettre en place un mécanisme de révision des taux suivant les performances économiques de chaque pays chaque x mois, et à réintroduire en circulation nationale les monnaies nationales d'avant l'euro, tout en gardant la possibilité de payer en euro dans n'importe quel autre pays de la zone euro, mais aussi en dehors où là sera appliqué un taux de change spot (mais pas fixe révisable comme pour les devises nationales des pays de la zone euro vis à vis de l'euro).
Le souci est que rare sont les politiciens qui comprennent la différence entre monnaie unique et monnai commune.
Merci pour cet article, toujours un plaisir de vous lire.
JPL